Savoir-être

Comment faire du perfectionnisme un avantage ?

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Tu as l’impression de ne pas progresser en français ? Tu es déçu.e de tes résultats ? Ça ne va pas assez vite ? Il est possible que tu sois freiné.e par un peu de perfectionnisme. Même si tu ne te considères pas comme perfectionniste, beaucoup de ses manifestations peuvent te concerner. Si faire des fautes te dérange, si tu penses que tu n’arriveras jamais à parler le français couramment, alors les 9 exercices conseillés dans cet article pourraient beaucoup t’aider.

Il y a, dans notre culture, une approche un peu contradictoire face au perfectionnisme. D’un côté, on le valorise. On donne une grande importance à l’ambition, à la recherche de l’excellence. On admire nos sportifs de haut-niveau qui savent dépasser les records de vitesse ou de force. Lors d’un entretien d’embauche, le perfectionnisme est souvent cité comme « faux défaut ».

Et d’un autre, les publications dédiées au développement personnel le condamnent. Il serait un élément destructeur, paralysant. Il nous empêcherait d’atteindre nos objectifs et de nous épanouir. Alors comment s’y retrouver ?

Le perfectionnisme comme frein

Quand on commence à faire quelques recherches, on se rend compte que deux sortes de perfectionnismes émergent : le perfectionnisme « positif » et le perfectionnisme « problématique ».

Ce perfectionnisme « problématique », « maladif », « toxique », « pathologique » ou encore « morbide » se manifeste chez beaucoup de personnes sous la forme d’exigences très élevées, pour soi et pour les autres. Les personnes perfectionnistes se fixent des objectifs trop souvent inaccessibles, impossibles, irréalistes. Et donc les efforts sont toujours insuffisants. La personne n’est « pas assez ». Pas assez intelligente, pas assez rapide, pas assez compétente.

Et les erreurs ? Inacceptables ! Chaque erreur est vécue comme une expérience catastrophique, un échec écrasant. Puis vient la rumination : « j’aurais pas dû faire ça ! quelle idiote ! comment je peux être aussi stupide ? »

Ces pensées, « pas assez », « quelle idiote », peuvent être considérées comme des distorsions cognitives, en réalité. Certains appellent ça un « étiquetage », ou du « labelling ». Il y a d’autres distorsions cognitives présentes dans le perfectionnisme, malheureusement. Comme la pensée en « noir ou blanc » ou « tout ou rien » : « si ce travail n’est pas parfait, alors il ne vaut rien. Si cette expérience n’apporte pas que des sensations positives, alors elle ne vaut pas la peine d’être vécue ». Il peut y avoir aussi une tendance à maximiser les aspects négatifs et minimiser les éléments positifs. Pour une liste plus complète des distorsions cognitives, je t’invite à lire l’article 9 techniques d’auto-évaluation.

Les conséquences ? Qui aurait envie d’entreprendre quoi que ce soit avec une pression pareille ? Les conséquences peuvent donc être la paralysie, l’immobilisme, l’évitement, qui mènent à une boule toxique composée d’insatisfaction, de stress, de tristesse, de colère et de frustration.

Pour la petite histoire
Imparfait ou plus-que-parfait ?

Apparemment, la perfection existe dans la langue ! L’appellation « imparfait » vient du latin praeteritum imperfectum et désigne un « temps verbal du passé présentant le procès comme non-accompli ». Le plus-que-parfait, quant à lui, vient du praeteritum plus quam perfectum et indique un « temps verbal du passé présentant le procès comme accompli et comme antérieur à un autre procès passé ». Et entre l’imperfection et la plus-que-perfection, que trouve-t-on ? Le passé composé, pardi ! A l’origine appelé prétérit parfait (l’espagnol a d’ailleurs gardé l’appellation preterito perfecto), il désigne une action du passé accomplie.

Donc pour la langue, il suffit qu’une action soit accomplie pour être parfaite. C’est pas joli, ça ?

Source : CNRTL

Le perfectionnisme comme élan

Le paragraphe sur le perfectionnisme pathologique est plutôt déprimant, non ? C’est ce qui se passe quand une personne se repose sur le perfectionnisme pour éviter un jugement ou pour essayer de plaire aux autres. Heureusement, il existe un autre perfectionnisme, un perfectionnisme « sain », « positif », ou « adapté ». Un perfectionnisme motivé non pas par la peur du jugement, mais par l’envie d’accomplir un défi personnel.

Dans ce cas, la personne sait moduler et adapter ses objectifs à la situation, elle sait être flexible. Ses critères d’auto-évaluation sont ajustés et réalistes. Aussi, cette personne accepte ses erreurs, les analyse et en retire des leçons. Elle est consciente de ses distorsions cognitives et elle sait les questionner et les reformuler de manière pus réaliste.

Conséquence ? Elle est motivée, elle est combative, elle célèbre ses réussites, accueille ses échecs comme des moments utiles et importants. C’est le plaisir et la satisfaction qui ont première place dans son travail. Elle est appliquée, méticuleuse et fière.

Quel tableau idéal, non ? Est-il possible ? Une telle perfection est-elle possible ? 😉

Pour aller plus loin
Vidéo Arte PsychoBugs #06

Témoignages de personnes perfectionnistes qui parlent de leur vécu, des stratégies qu’elles mettent en place pour le contourner, et un commentaire en recul d’une coach. (Disponible jusqu’au 17/12/2025)

Podcast psy.link #21

Imparfait et perfectionniste ? Approche plus approfondie et plus technique des mécanismes liés au perfectionnisme.

Transformer le perfectionnisme problématique en perfectionnisme sain

Voyons s’il est possible de « convertir » les composants du perfectionnisme « morbide » en attitudes plus saines et adaptées.

Tableau 1

1. Identifier les pensées, sensations et comportements

La première étape serait donc de te demander si ton perfectionnisme est plutôt positif, s’il te pousse à l’action, ou s’il est handicapant, s’il te fige et t’empêche de réaliser des choses. Et s’il te pousse à l’action, quelles sont les sensations que tu ressens ? De la panique ou de l’entrain ? De la frustration ou de la motivation ? Quelles sont les sensations présentes dans ton corps ?

2. Reformuler les pensées

Quelles sont les pensées qui sont présentes dans le processus de réalisation ? Sont-elles positives ou négatives ? Si elles sont négatives, sont-elles vraiment réalistes ? Par exemple, prenons la pensée « je n’arrive jamais à rien ». Jamais, vraiment ? Jamais, jamais, jamais ? 😉 Essayons la pensées suivante : « je rate parfois des choses, mais la plupart du temps je réussis ». Que penses-tu de cette formulation ?

3. Réévaluer les objectifs

Cet exercice est difficile pour moi, je dois l’avouer 😉 Qu’est-ce que ça veut dire un objectif inatteignable ? C’est quoi un objectif réaliste ? Si je rêve de parler couramment le français, et que pour l’instant je suis encore très hésitante, est-ce que mon objectif est irréaliste ?

Pour une personne perfectionniste, revoir ses objectifs « à la baisse » peut être source d’anxiété et de tristesse. Ce serait comme « avouer » qu’on n’est pas capable, « pas assez ». Alors essayons de voir les choses différemment. « Parler couramment », c’est un objectif très vague, trop indéfini. Qu’est-ce que ça veut dire pour toi, parler couramment ? Avoir une conversation longue sur un sujet qui te passionne ? Comprendre une conférence universitaire sur le sujet ?

Quand un objectif est grand et lointain, cela peut être décourageant, alors il vaut mieux imaginer des étapes intermédiaires. Se fixer un objectif à court terme qui soit accessible, comme être capable de lire un article sur le sujet qui te passionne tiré d’une publication de vulgarisation, par exemple. Le vocabulaire sera plus abordable, et tu pourras prendre ton temps pour chercher les mots inconnus dans le dictionnaire.

A lire aussi
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Comment définir des objectifs ?

4. Célébrer la réussite

Et quand tu auras atteint l’étape intermédiaire, met un point d’honneur à célébrer ta réussite. On l’a vu plus haut, les perfectionnistes ont beaucoup de mal à ressentir de la satisfaction et ont tendance à donner trop d’importance au négatif. Alors même si tu ne le « sens » pas, marque le coup en passant du temps à penser à ta réussite et vois si tu peux entrevoir un petit peu de fierté. Va au restaurant, offre-toi un petit cadeau, quelque chose que tu pourras voir souvent et qui te rappellera ta réussite.

5. Apprendre le lâcher-prise

Encore un exercice qui a été difficile pour moi 😉 Le lâcher-prise, c’est le fait de vouloir quelque chose, sans y être attaché. C’est un concept qu’on rencontre beaucoup dans le développement personnel et la pleine conscience ces derniers temps. Et jusqu’à très récemment, je pouvais comprendre intellectuellement ce que cela voulait dire, mais je ne voyais pas « quoi faire » pour l’appliquer à mes propres sensations.

Lâcher prise
Tyler Martin sur Unsplash

D’après ce que j’ai compris, cela à voir avec la peur des conséquences, et ce qu’elles pourraient dire de négatif à propos de moi. Si mon objectif est de parler couramment une langue étrangère et que je n’y arrive pas, cela voudra dire que je suis une incapable, que je suis moins intelligente que les autres. Alors je m’accroche à mon objectif de toutes mes forces, je mets des oeillères et je refuse de considérer d’autres approches ou perspectives. Lâcher prise dans ce cas, ça voudrait dire abandonner. Cela te rappelle quelque chose ? La pensée « tout ou rien » ? 😉

Alors, comment je peux faire pour lâcher prise sans abandonner mon objectif ?

Premièrement, il s’agit de prendre conscience des pensées catastrophe : « je suis une incapable », etc. Les écrire, ou les dire à haute voix et voir si elles sont réalistes. Puis les reformuler, pour qu’elles sonnent plus « vrai ».

Ensuite, imagine quelles pourraient être les étapes intermédiaires à ton objectif, comme on l’a vu plus haut. Et finalement, essaye de te focaliser sur le plaisir de l’activité, au lieu d’être obnubilé.e par les résultats, comme on va le voir dans le paragraphe suivant.

6. Se focaliser sur le plaisir

Comme on l’a vu plus haut, les personnes perfectionnistes ont tendance à se focaliser sur la productivité et sur les résultats, ce qui les rend extrêmement critiques et exigeantes envers elles-mêmes. Tout tourne autour de ce que je peux réaliser, et comment cela va prouver que je suis quelqu’un d’exceptionnel, ou du moins quelqu’un de valable. Malheureusement, cette ambition est souvent illusoire et crée beaucoup de souffrance et de déception.

Ce qui a été très utile pour moi, quand j’ai commencé à créer ce blog, c’était de ne choisir que les tâches qui m’apportaient du plaisir, au début. Chaque matin, quand je me réveillais, je me demandais ce que j’avais envie de faire, ce qui m’apporterait du plaisir, et je le faisais. Bien-sûr, cette approche n’est pas viable sur le long terme. Dans chaque projet il y a des tâches qui sont moins amusantes que les autres, et certaines qui sont carrément ennuyeuses. Mais pour quelqu’un comme moi qui essayait de sortir de la paralysie, ça a été une étape cruciale.

Par la suite, quand j’ai appris à voir le plaisir d’une tâche avant d’en considérer le côté pratique et utile, j’ai commencé à considérer et incorporer des tâches moins intéressantes dans mon emploi du temps.

Et de ton côté ? Qu’est-ce qui t’apporte du plaisir dans l’apprentissage du français ? Qu’est-ce qui t’enthousiasme et te motive ? Concentre-toi uniquement sur ces aspects pendant un temps …

7. Valoriser l’effort

Valoriser l'effort pour court-circuiter le perfectionnisme maladif
Plato Terentev sur Pexels

Ce principe est similaire à la focalisation sur le plaisir, et sert à cour-circuiter l’obsession du résultat. Il s’agit de remplacer la recherche de la perfection par des choses tout aussi valorisées par la société : le courage et la persévérance.

Soyons honnête, être perfectionniste n’est pas du gâteau. On est quand même bien souvent paralysé par la peur. La peur de l’échec, la peur de l’erreur, la peur du jugement de l’autre. La peur de se rendre compte de ses faiblesses, et qu’elles soient vues par les autres. Donc le courage prend toute son importance ici. Beaucoup définissent le courage comme une attitude de réponse à la peur : on a peur, mais on le fait quand même. Il faut donc passer un peu de temps à identifier quelles sont tes peurs et tes pensées (voir le point numéro 1). Reformuler les pensées irréalistes est nécessaire, mais n’est souvent pas suffisant. Qu’est-ce que tu peux faire comme action qui va non seulement prouver à ta peur qu’elle est exagérée, mais aussi te prouver à toi-même ta capacité de courage et de persévérance ?

8. Savoir établir des priorités

Quand on est perfectionniste, souvent chaque détail compte. Chaque petit élément a une importance critique. « Si je laisse tomber ce détail, alors je vais produire un travail bâclé et sans qualité. Ce sera nul. Non, tout doit être comme je me l’imagine ». Le problème étant que dans la réalité, tous les détails d’un projet n’ont pas la même importance. Donc comme pour la définition des étapes intermédiaires, établis une hiérarchie dans l’importance des éléments qui composent ton projet. Et rassure-toi, dire qu’un élément est moins important qu’un autre ne veut pas dire que tu vas le laisser tomber. Il s’agit simplement d’identifier ce qui a le plus d’importance pour que tu puisses le faire en premier, et y apporter un soin plus particulier.

9. Savoir apprendre de ses erreurs

Cet exercice est peut-être le plus difficile pour une personne perfectionniste. Comme les erreurs sont inacceptables et impardonnables, les regarder en face relève presque de l’impossible. Pourtant elles sont là pour une raison, ces erreurs. N’as-tu pas envie de comprendre pourquoi elles ont été commises ?

Pour comprendre, la toute première chose à faire est de se détacher du jugement. On pense automatiquement « une erreur, c’est quelque chose de négatif, ce n’est pas bien ». Si tu penses cela, alors ton esprit va être bombardé de récriminations et accusations. Mais si tu peux voir l’erreur sans la juger, alors tu peux commencer à la comprendre, et à en tirer des leçons.

Comment s’organiser ?

Donc voilà les exercices à essayer pour apprendre à transformer le perfectionnisme paralysant en perfectionnisme motivant :

Tableau 2

Tu auras certainement remarqué maintenant que le perfectionnisme n’est pas un état binaire (soit on est perfectionniste, soit on ne l’est pas). Non, Il s’agit plutôt d’une question de degrés et de domaines. On peut être un peu perfectionniste en ce qui concerne notre façon de nous habiller, pas du tout avec nos proches, et extrêmement dans notre travail.

Et toi, quel est ton degré de perfectionnisme ? Est-ce qu’il s’exprime dans tous les domaines de ta vie ou seulement certains ? Quels exercices ou stratégies fonctionnent le mieux pour toi ? Raconte-nous dans les commentaires 💬

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